Livre
Boris CYRULNIK — Le Laboureur et les Mangeurs de vent
Fiche de lecture
Dans l’histoire de Cyrulnik, ce dernier a survécu à une synagogue reconvertie en prison lorsqu’il avait 7 ans, en se faisant passer pour mort sous le corps d’une dame agonisante. Comme pour refuser l’existence du mal absolu, il a fait en sorte que sa mémoire traumatisée se focalise sur des petits détails contenant des preuves d’humanité et de compassion autour de lui. Durant cette période, il se demanda si ces fameux détails étaient des chimères créées par son refus de percevoir ce mal, ou si ses perceptions étaient bien réelles…
Boris Cyrulnik
Le laboureur et les mangeurs de vent
N’hésitez pas à donner votre propre avis, en fin de page, si vous avez lu cet ouvrage.
Détails sur cette fiche de lecture
Specifications
Mots clés
Appréhender un grand malheur
L'empathie salvatrice
Comment construire une guerre ?
Analyse du développement humain
Besoin d'attachement
Le bien et le mal
Banalisation du mal
Problème dans la construction de nos villes
Mal idiot ou intelligent ?
Coûteuse libre pensée
Comment agir ?
Note d'introduction
C’est un de mes livres préférés ! J’ai appris à connaître son auteur au travers de cette œuvre, et je ne le regrette pas. On y apprend à la fois beaucoup de choses autour de la construction des liens parents-enfants, sur une gestion possible des traumatismes, sur la résilience, et sur la propagation (à l’époque) de l’idéologie du nazisme. On y comprend nos mécanismes primitifs, comment s’en défendre, et comment il serait bon de construire une société à échelle plus humaine où l’enfant serait au cœur de nos préoccupations.
Un livre qui porte sur la liberté intérieure et la confortable servitude
En vous souhaitant une bonne lecture !
Table des matières
Introduction
Le livre commence par une réflexion simple qui consiste à savoir comment appréhender un grand malheur qui arriverait dans notre vie. Soit on décide d’en être victime, soit on décide de donner du sens au malheur en partant en quête de sa compréhension.
Dans l’histoire de Cyrulnik, ce dernier a survécu à une synagogue reconvertie en prison lorsqu’il avait 7 ans, en se faisant passer pour mort sous le corps d’une dame agonisante. Comme pour refuser l’existence du mal absolu, il a fait en sorte que sa mémoire traumatisée se focalise sur des petits détails contenant des preuves d’humanité et de compassion autour de lui. Durant cette période, il se demanda si ces fameux détails étaient des chimères créées par son refus de percevoir ce mal, ou si ses perceptions étaient bien réelles.
Une aide inattendue, et incompréhensible
Ce soldat SS qui lui montra une photo de son fils blond par exemple (en disant à Boris qu’il lui ressemblait). Ou encore cette infirmière qui l’aurait vu vivant dans le camion, mais qui n’aurait rien dit à ses supérieurs… cela restera un mystère…
L’auteur du livre partira en quête de la compréhension de l’origine de la Seconde Guerre mondiale, ou plus précisément de la montée en puissance du nazisme.
Une volonté de comprendre
Dans sa réflexion, il passera par l’analyse du développement des êtres humains, débutant par le lien de dépendance naturelle entre l’enfant et le premier parent (la mère) et le deuxième parent (le père). Ce lien de dépendance/d’attachement nous suivra toute la vie.
Le premier contact que l’enfant aura avec le parent est chimique (par le cordon), le second sera le toucher, et les prochains viendront des autres sens. Puis, ce n’est que vers les quatre à six ans qu’un autre monde « imaginaire » se tissera entre l’enfant et le parent : la parole. C’est un monde de projections dans lequel il n’aura d’autre choix que de faire confiance à son parent, qui devra tout lui apprendre. Cet univers de mots est une création de l’esprit, car il n’existe pas vraiment. « Raconter », c’est bien décrire quelque chose par notre prisme. C’est donc une machine à pièges qui se referme sur nous dès cet âge.
Les besoins d'attachement
Revenons aux besoins d’attachement. Ce dernier a été un bel outil pour le nazisme, par lequel un petit groupe a réussi à faire naître un besoin d’appartenance à d’autres, pour les convertir.
Quant aux sentiments, qu’en est-il de la notion de bien et de mal ? Ne sont-ils pas là pour nous empêcher de commettre des horreurs ? Ces sentiments seront facilement effacés par le besoin d’appartenance, par l’effet de halo, et par la soumission à l’autorité (la tenue/le déguisement).
Un problème dans la construction même de nos villes
La banalisation du mal a été également facilitée par la conception même de nos villes, où nous habitons tous les uns sur les autres. Nous sommes plus nombreux, et nous ne pouvons plus prendre le temps de faire connaissance avec nos voisins. Nous aurons donc tendance à considérer nos proches comme des étrangers.
L’auteur du livre constatera que les poches de résistance se sont surtout conçues dans les petits villages, où tout le monde se connaissait depuis l’enfance. Cela rendait plus difficile le fait de considérer des proches comme de parfaits étrangers, malgré les effets psychologiques cités ci-dessus. Le besoin d’appartenance était déjà créé par l’amour des uns pour les autres.
L’auteur nous rappelle qu’il faut se méfier de ce qui nous tranquillise trop, de ce qui engourdit la pensée.
Parmi les effets plus perfides, il y a celui du sentiment d’être utile, d’avoir du pouvoir.
Que faut-il pour répandre le mal ?
C’était le cas d’un des grands secrétaires du nazisme, qui ratifia tous les documents ayant permis d’envoyer des millions de Juifs à la mort par les trains allant aux camps. Il le faisait tranquillement, et était fier de son travail. Fier d’être utile. Il fut diagnostiqué alexithymique [Ndlr : Alexithymique, difficulté à identifier, différencier et exprimer ses émotions, ou parfois celles d’autrui. Ce trait de personnalité est communément observé parmi les patients présentant des troubles du spectre autistique et des symptômes psychosomatiques.]
Le gouvernement nazi n’était pas peuplé d’idiots. Il était au contraire composé d’intellectuels. Alors, comment expliquer ce qu’il s’est passé ?
Se faire passer comme attaquant n’est jamais bien vu. Il a fallu créer de toutes pièces un besoin de se défendre face à une situation fictive. Les juifs envahissaient l’Allemagne, boycottaient les produits allemands… Dans une société aseptisée, créer un danger donne une raison d’exister, une sensation extrême, une fonction d’éveil… donne l’impression d’exister, d’être vivant.
Être libre penseur a un prix
Il faut un récit pour organiser un groupe. Une représentation verbale : soit dit en passant, un univers fictif partagé. Parce qu’une certitude partagée n’a pas besoin de preuves pour déclencher une violence sans frein. Quand on pense comme tout le monde, on évite les conflits. Quand on partage les mêmes croyances, on se sent apparentés. Quand on récite ce que les autres récitent, on éprouve un sentiment de force et de vérité. L’emprise est délicieuse. Elle apporte tant de bénéfices. Ça soulage, ça déresponsabilise, ça fait appartenir à quelque chose de « plus grand ». En bref : c’est sécurisant.
Penser par soi-même, c’est s’isoler. C’est perdre des amis. L’angoisse est le prix de la liberté.
Mais alors... comment agir ?
Nous pouvons agir sur le milieu qui nous entoure. Il suffit d’organiser autour des enfants un milieu sécurisant qui leur donnera le plaisir d’explorer. Il faudra leur proposer des figures d’attachement pour leur apprendre à aimer de diverses manières. Ouvrir leur esprit en leur apprenant plusieurs langues, plusieurs manières de penser, d’explorer diverses cultures.
Nous possédons les outils pour agir sur le réel qui nous entoure. C’est un degré de liberté, donc de responsabilité.
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